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d’exciter sa jalousie, il poussa son cheval et passa rapidement auprès d’elle avant qu’elle pût reconnaître Geneviève. En voyant le perfide à qui elle avait donné rendez-vous s’enfuir à toute bride avec une femme en croupe, Henriette, frappée de surprise, n’eut pas la force de faire un cri et resta pétrifiée jusqu’à ce que la colère lui suggéra un déluge d’imprécations que Joseph était déjà trop loin pour entendre.

C’était la première fois de sa vie que Geneviève montait sur un cheval. Celui de Joseph était vigoureux ; mais, peu accoutumé à un double fardeau, il bondissait dans l’espoir de s’en débarrasser.

« Tenez-moi bien ! » criait Joseph.

Geneviève ne songeait pas à avoir peur. En toute autre circonstance, rien au monde ne l’eut déterminée à une semblable témérité. Courir les chemins la nuit, seule avec un libertin avéré comme l’était Joseph, c’était une chose aussi contraire à ses habitudes qu’à son caractère ; mais elle ne pensait à rien de tout cela. Elle serrait son bras autour de son cavalier, sans se soucier qu’il fût un homme, et se sentait emportée dans les ténèbres sans savoir si elle était enlevée par un cheval ou par le vent de la nuit.

— Voulez-vous que nous prenions le plus court ? lui dit Joseph.

— Certainement, répondit-elle.

— Mais le chemin n’est pas bon : la rivière sera