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suivi dans les étranges et rades chemins où je t’ai fait marcher !

Et il se plut à lui rappeler, ce que, depuis trois ans, elle avait supporté en souriant pour l’amour de lui : les malédictions de sa famille, l’abandon de son ancien entourage, l’étonnement du monde, la vie si peu aisée dans les commencements, si retirée d’habitude ; car Laure n’avait voulu se procurer aucun bien-être, tant que son amant se l’était refusé à lui-même. Leur intérieur avait été si modeste, que, relativement à ses jeunes années et au séjour de Larnac, le séjour de Paris et de Londres avait été pour elle presque rigide d’austérité. Comme elle avait changé aussi toutes ses idées pour arriver à s’intéresser à la destinée d’un artiste vendu et livré à la foule ! Comme, du jour au lendemain, elle avait abjuré toutes ses notions sur la dignité de l’art et sur le mystère du bonheur, pour venir, du fond de ce désert, saluer, en plein théâtre, le triomphe d’un débutant !

— Dis-moi donc, redis-moi donc toujours, s’écria-t-il, ce qui s’est passé en toi, ici, le jour où tu as connu ma résolution et reçu mes adieux !

— Tu le sais, répondit-elle, quoique je n’aie jamais pu te le bien expliquer ; j’ai senti que j’allais mourir, voilà tout. Je ne comprenais rien, sinon que tu renonçais à moi ; et, pardonne-le-moi, j’ai cru que tu ne m’aimais plus, puisque tu me disais de t’oublier. Tes belles