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— Pardonne-moi ! pardonne-moi !

Adriani réussit à lui faire comprendre, à lui faire croire que la somme fatale n’avait pas été versée par Bosquet, et que sa ruine n’avait aucune des conséquences funestes qui, sur toutes choses, tourmentaient le moribond ; mais le malheureux Descombes, tout en exhalant ses derniers souffles, avait encore toute sa tête, toute sa mémoire. Il sentit bientôt qu’Adriani le trompait pour le consoler.

— Généreux ! lui dit-il avec un regard de douleur suprême.

Puis sa raison se perdit tout à coup ; il cria des mots d’argot de la Bourse, vit des chiffres formidables passer devant ses yeux, et s’efforça de les effacer avec ses mains convulsives ; puis il se prit à rire, disant :

— La misère !… l’art !… Je suis peintre !…

Ce furent ses dernières paroles. Ses dents craquèrent dans d’affreux grincements. Il expira.

Adriani demeura atterré auprès de ce lit de mort, qui était celui de sa propre destruction morale. Valérie l’emmena dans son salon.

— Adriani, lui dit-elle, je suis consternée et navrée. Pourtant ma douleur ne peut se comparer à la vôtre : Descombes ne m’a pas aimée. Excepté vous, le malheureux n’aimait plus rien ni personne. Il avait peut-être raison ! Il méprisait ses propres plaisirs et les payait ma-