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et sa belle-mère, assises dans un assez beau salon, qui passait pour somptueux dans un pays où le luxe a fort peu pénétré, causaient ensemble pour la première fois depuis bien longtemps. Laure, involontairement, mais profondément froissée par le stoïcisme intolérant de la marquise, s’était presque toujours renfermée dans un silence respectueux, se disant, avec raison, qu’une personne dont toute l’action morale se bornait à la science des égards n’avait pas droit à autre chose que des égards. Arrivée la veille et très-fatiguée, Laure s’était levée tard et commençait avec la marquise un entretien qui ne pouvait être un épanchement et qui prenait le caractère d’une explication.

— Eh bien, ma fille, dit la marquise, dont la voix inflexible ne savait mettre aucune douceur dans ce parler maternel, vous êtes reposée, vous pouvez me parler de vous-même. Mademoiselle Muiron, que j’ai interrogée ce matin sur votre santé, m’a répondu que vous étiez à la fois mieux et plus mal ; mais cette bonne personne a si peu de jugement, que j’aime mieux ne m’en rapporter qu’à vous. Je ne saurais la suivre dans son langage affecté et dans ses réponses embrouillées. Voyons, comment vous trouvez-vous au physique et au moral, après l’étrange voyage que vous venez de faire ?

Laure se sentit peu disposée à répondre à des marques d’intérêt qui ressemblaient à une critique. Elle se contenta