homme du monde, bien qu’il soit pauvre lui-même. Cela est à sa louange.
» Et vous avez ajouté :
» J’ai regretté autrefois de ne pas l’avoir connu ; mais, aujourd’hui, j’en suis toute consolée. Malgré tout ce que l’on m’a dit de son originalité, il ne me semble pas qu’il puisse vous être supérieur.
» Eh bien, Laure, cet Adriani, c’est moi. Je m’appelle effectivement d’Argères, et je suis d’une famille noble ; mais mon nom de baptême est Adrien. Né en Italie, j’ai pu, sans déguisement puéril, italianiser ce prénom. Mon père occupait d’assez hauts emplois dans la diplomatie. J’avais été élevé avec soin, j’étais né musicien. Je me suis développé, comme voix et comme instinct, sous un soleil plus musical que le nôtre. J’ai beaucoup vécu, dans mon adolescence, avec le peuple inspiré du midi de l’Europe et des côtes de la Méditerranée. Tout mon génie consiste à n’avoir pas perdu, dans l’étude technique et dans le commerce d’un monde blasé, le goût du simple et du vrai qui avait charmé mes premières impressions, formé mes premières pensées.
» Orphelin de bonne heure, je me suis trouvé sans direction et sans frein à l’âge des passions. J’avais quelque fortune et beaucoup d’amis, les artistes en ont toujours, car déjà on m’écoutait avec plaisir. Italien autant que Français, jusqu’à l’âge de ma majorité, je ne connus