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CONSUELO.

brillante avec le temps. Consuelo n’avait guère coutume de penser à l’avenir. La prévoyance n’était point au nombre de ses occupations d’esprit. Elle eût encore cultivé la musique sans autre but que celui d’obéir à sa vocation ; et la communauté d’intérêts que la pratique de cet art devait établir entre elle et son ami, n’avait pas d’autre sens pour elle que celui d’association de bonheur et d’affection. C’était donc sans l’en avertir qu’il avait conçu tout à coup l’espoir de hâter la réalisation de leurs rêves ; et en même temps que Zustiniani s’était préoccupé du remplacement de la Corilla, Anzoleto, devinant avec une rare sagacité la situation d’esprit de son patron, avait improvisé la proposition qu’il venait de lui faire.



Consuelo.

Mais la laideur de Consuelo, cet obstacle inattendu, étrange, invincible, si le comte ne se trompait pas, était venu jeter l’effroi et la consternation dans son âme. Aussi reprit-il le chemin de la Corte-Minelli, en s’arrêtant à chaque pas pour se représenter sous un nouveau jour l’image de son amie, et pour répéter avec un point d’interrogation à chaque parole : Pas jolie ? bien laide ? affreuse ?

VIII.

« Qu’as-tu donc à me regarder ainsi ? lui dit Consuelo en le voyant entrer chez elle et la contempler d’un air étrange sans lui dire un mot. On dirait que tu ne m’as jamais vue.

— C’est la vérité, Consuelo, répondit-il. Je ne t’ai jamais vue.

— As-tu l’esprit égaré ? reprit-elle. Je ne sais pas ce que tu veux dire.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! je le crois bien, s’écria Anzoleto. J’ai une grande tache noire dans le cerveau à travers laquelle je ne te vois pas.

— Miséricorde ! tu es malade, mon ami ?

— Non, chère fille, calme-toi, et tâchons de voir clair. Dis-moi, Consuelita, est-ce que tu me trouves beau ?

— Mais certainement, puisque je t’aime.

— Et si tu ne m’aimais pas, comment me trouverais-tu ?

— Est-ce que je sais ?

— Quand tu regardes d’autres hommes que moi, sais-tu s’ils sont beaux ou laids ?