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JEANNE.

eux, monsieur Léon. Ne vous donnez pas la peine de me conseiller, je n’ai pas besoin d’un avocat.



Finaud s’arrêta court. (Page 76.)

— Les avocats, comme les confesseurs, sont des gens auxquels on ne cache rien, et qu’on ne se repent jamais d’avoir consultés. Sois sûre Jeanne, que je sais tous les secrets de la maison d’où tu sors, et que demain on me dira ce que tu veux me taire aujourd’hui. Madame de Boussac me consulte sur toutes choses, et tu verras que je serai envoyé vers toi, demain peut-être, te dis-je, pour te donner ou pour te demander des explications. Si tu m’informais la première de tes sujets de plainte, la réconciliation pourrait marcher beaucoup plus vite, et tes intérêts seraient mieux défendus.

— Ah ! mon Dieu, monsieur Léon, voilà que vous faites une affaire de tout cela ! Il n’y a pas besoin d’en chercher si long, je vous assure ; et si c’est vrai qu’on vous dit tout, vous pourrez répondre que je pardonne tout.

— Jeanne, tu es bien réservée avec moi, dit Marsillat, qui lui avait jusqu’alors parlé à distance, et qui se rapprocha insensiblement à mesure qu’il réussit à la distraire de l’empressement de partir. Si je te disais que je sais déjà ce dont il s’agit.

— Si vous le savez, ne m’en parlez donc pas, répondit Jeanne ; j’ai assez de chagrin comme cela.

— Je ne veux pas te faire de chagrin, ma pauvre Jeanne ; ce serait m’en faire davantage à moi-même. Mon intention est de t’en épargner de nouveaux. Je te dis que je sais tout, car il n’y a pas plus de huit jours que j’ai été consulté par madame de Boussac pour savoir si Guillaume te faisait la cour.

— Ah ! mon Dieu ! dit Jeanne blessée dans l’exquise délicatesse de son cœur par cette révélation malheureusement trop vraie, ma marraine a eu le cœur de vous parler de ça ?…

— Elle ne le croyait pas ; mais la grosse Charmois le lui répétait si souvent qu’elle commençait à s’en inquiéter. Cela ne doit pas te surprendre, Jeanne ; une mère s’effraie toujours de voir souffrir son fils, et…

— Mais on veut donc absolument que je sois cause de tout le mal qui arrive à M. Guillaume ?

— La Charmois le prétend ainsi ; mais moi j’ai essayé