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LE PICCININO.

bien qu’il dit vrai. Je te fais serment que, depuis hier matin, lorsque je t’ai apporté les feuillages que tu m’avais demandé de cueillir, je ne suis pas entrée dans la grotte.



Le lendemain matin, on trouva Ercolano assassiné… (Page 42.)

― Ah ! Mila, c’est trop fort. Tu n’étais pas menteuse autrefois, et je suis fâché de te voir ce vilain défaut maintenant.

― Taisez-vous, frère, vous m’offensez, dit Mila en retirant son bras avec fierté. Je n’ai jamais menti, et je ne commencerai pas aujourd’hui pour vous faire plaisir.

― Petite sœur, reprit Michel en se rapprochant d’elle et en doublant le pas pour la suivre, car elle s’en allait en avant, piquée et affligée, voulez-vous bien me montrer le bijou que madame Agathe vous a donné ?

― Non, maître Michel-Ange, répondit la jeune fille ; vous n’êtes pas digne de le regarder. Dans le temps où je coupais vos cheveux pour les porter sur mon cœur, vous n’étiez pas méchant comme vous l’êtes devenu depuis.

― À votre place, j’ôterais le médaillon de mon sein, dit Michel avec ironie, et je le jetterais tout de suite au nez du méchant frère qui me tourmente de la sorte.

― Tenez ! le voilà ! dit la petite fille en saisissant dans son corset le médaillon, et en le remettant à Michel avec dépit ; vous pouvez reprendre vos cheveux, je n’y tiens plus. Seulement, rendez-moi le bijou : j’y tiens, parce que c’est le don d’une personne meilleure que vous.

― Deux médaillons semblables ! se dit Michel en les réunissant dans sa main : est-ce la suite de ma vision ? »

XIX.

JEUNES AMOURS.


Michel n’osa point demander à sa sœur l’explication d’un tel prodige. Il courut s’enfermer dans sa petite chambre, et, s’asseyant sur son lit, au lieu de dormir, il ouvrit et compara le contenant et le contenu de ces joyaux identiques. Ils étaient absolument pareils : ils renfermaient les mêmes cheveux, à tel point que lorsqu’il les eut examinés et touchés longtemps, il ne sut plus lequel appartenait à sa sœur. Il se rappela alors une parole de celle-ci, qui l’avait peu frappé, quoiqu’elle lui eût paru singulière au premier instant. Mila prétendait qu’entre les mains du bijoutier la mèche de cheveux qu’elle avait confiée à la princesse avait diminué de moitié.