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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN

avec lui. Brusquement il l’enlevait de terre, et d’un seul coup l’installait sur sa large croupe ; alors, nouant ses petits bras au torse puissant du dieu, Hyalis se laissait emporter ; c’étaient de longs galops torrentueux à travers les plaines et la montagne ; un vent rude frappait son visage ; les arbres du paysage semblaient courir avec lui ; le quadruple bruit des sabots retentissait sur la terre sonore ; un léger effroi suspendait son cœur, et quand tout à coup la course s’arrêtait, il battait des mains et riait aux éclats, les yeux brillants, les joues éclatantes, tout le sang ivre d’espace et de rapidité… Mais le plus souvent un attrait mystérieux le ramenait vers les rivages de la mer. En sortant des forêts ténébreuses ou des vallées profondes, l’immense horizon tout à coup découvert l’envahissait d’une inexprimable allégresse ; tant d’espace entrait dans ses yeux que son âme lui en semblait comme élargie ; il buvait avidement l’air chargé de sel ; et, piaffant des sabots