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CONTES

petit, et, pendant dix jours, malgré toutes les instances, vécut dans la chambre empoisonnée, dormant à peine quelques heures çà et là, sur un fauteuil, et ne quittant point ses vêtements. Elle subissait la sublime fascination du sacrifice ; son dévouement avait quelque chose d’irrésistible et d’égaré ; et elle marchait, transfigurée, dans l’air de feu de l’héroïsme pur.

René fut sauvé ; mais trop d’émotions l’avaient assaillie ; sa santé était irrémédiablement compromise, et elle mit au monde, à travers mille souffrances, un enfant qui ne vécut que quelques jours.

Ainsi la vie s’acharnait sur elle ; et, à voir ses coups redoublés, on pouvait penser que la Destinée voulait parachever son œuvre, développer jusqu’au bout l’harmonieux martyre d’une créature choisie, et faire exprimer à cette âme, macérée dans la douleur, son parfum le plus suave.

Après de passagères et instinctives secousses