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CONTES

fureur. Il n’eut point de peine à deviner le coupable, l’état lamentable du faune le désignait assez. Sans hésiter, il le sortit de la vitrine et, le jour même, il s’en débarrassait à vil prix.

Dès lors commença pour l’infortuné la série des pitoyables déchéances. Il connut le cynique marchandage des ventes publiques, l’exil poussiéreux dans les coins sans lumière, l’affliction des toiles d’araignée. D’ailleurs, il était devenu méconnaissable ; ce n’était plus qu’une chose sans valeur, et il s’en alla finir sur le trottoir, dans l’infâme abjection des faïences de rebut, de la ferraille et des portraits de famille !

Certes, une telle accumulation de désastres pourrait fournir la plus riche matière à d’ingénieux moralistes. Les nations, depuis les temps les plus reculés, s’étant obstinément complu à distiller leurs faits divers pour en extraire de la sagesse, on n’aurait, sur ce point, que l’embarras du choix. Mais il me répugnerait de me livrer à cette besogne,