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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN


Regardent sur le parc au faste séculaire
S’effeuiller en lys bleus l’heure crépusculaire.
Immobiles, les mains vagues, le col penchant,
Elles rêvent, le cœur vers le soleil couchant
Qui, s’épuisant encore en caresses subtiles,
Traîne un rayon mourant dans leurs yeux immobiles
Et semble à leurs pâleurs fragiles prodiguer
La câline douceur d’un adieu fatigué.
Or de ces Dames, l’une a nom Mélancolie,
L’autre Amertume, l’autre Espérance-Abolie,
Puis encor Souvenir, Exil, Renoncement,
Volupté, Lassitude et Découragement.
À leur souffle si faible, à leur mourante haleine
Le miroir le plus pur se ternirait à peine,
Et si fluides sous leurs longs cheveux flottants,
Et telles, on dirait, les filles de l’Étang,
De l’Étang qui reflète en son cœur monotone
Les somptuosités tristes des soirs d’automne.
La plus fière, rigide en ses brocarts lamés,
A nom Indifférence et ses yeux sont fermés !

L’ombre à flots vaporeux baigne les troncs des arbres,
Les eaux, les jardins bleus où s’érigent les marbres ;