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CONTES

où ma seconde sœur est morte, et depuis n’en a jamais plus franchi le seuil.

― Tu avais donc une autre sœur ?

― J’avais deux autres sœurs, et toutes les deux sont mortes, et ma mère, de chagrin, est morte à son tour. Ne t’étonne point, la mort, dans notre pays, règne en souveraine. À toute heure, elle pousse la porte des maisons et s’installe au foyer ; c’est la visiteuse familière, et les gens ici sont si accoutumés à la voir qu’ils ne retournent même point la tête quand elle entre. Nous savons que la vie s’appelle aussi la douleur, et que notre vie est comme un anneau vulgaire où doit s’enchâsser le diamant de l’épreuve. Aussi, dans notre cœur, tu ne trouverais que ces mots : « Que la volonté de Dieu soit faite ! »

Angisèle, debout, leva les yeux au ciel et sourit d’un sourire ardemment triste, toute son âme de vierge en oblation dans ses mains ouvertes.

Rovère la regardait : l’extraordinaire magnétisme