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CONTES

les sapins, tout le ciel devint rouge, et des réverbérations s’allumèrent çà et là aux rares ouvertures du château ; puis des cloches tintèrent lentement, longuement, comme des larmes tombent, et Rovère, accablé de tristesse, crispa ses doigts sur sa poitrine et s’évanouit.

Alors, comme en rêve, au bout d’un temps indéfini, il vit, à la lueur des torches de résine, de vagues figures rangées autour de lui. Toute vêtue de noir, une jeune fille agenouillée lui soulevait doucement la tête. Lentement, sur son front, où la sueur avait collé les cheveux, sur ses yeux éteints, sur ses lèvres, elle passa un linge fin imprégné d’essence, et la charité de ses gestes était suave. Des hommes s’avancèrent, portant un brancard, où ils déposèrent Rovère, et se mirent en route vers le château.

Les ténèbres étaient épaisses ; le vent gémissait au loin sur les marais ; çà et là, au passage, des feuillages s’éclairaient de lueurs rougeâtres pendant que des oiseaux nocturnes