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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN

fleuve en admire mieux le cours majestueux que celui qui nage au milieu du courant, ainsi Hyalis, moins étroitement lié à la vie obscure des eaux et des bois, embrassait avec plus d’ampleur l’ordre et les lois du vaste univers, et tirait de sa contemplation des impressions plus profondes.

À présent, le rythme éternel du monde, le cours silencieux des astres, la mer mobile et infinie, les feux argentés de la nuit succédant à l’éclat du jour, la beauté partout éparse dans les êtres, depuis le hennissement des étalons cabrés jusqu’au vol effilé des hirondelles, tout l’emplissait d’un ravissement confus.

En outre, le poison d’Ydragone, poursuivant sa marche sûre, attaquait sourdement ses forces ; et son âme, moins nourrie des énergies du sang, s’inclinait avec une sympathie secrète vers les formes de la vie où il percevait un déclin. L’agonie d’un lent crépuscule, la fatigue d’une fleur qui se penchait entre ses doigts propageaient sur sa sensibilité plus fine