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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN

avaient noyé le jardin, et les choses prenaient autour d’eux la solennité de l’ombre.

Quand la lune, arrivée au tiers de sa course, baigna tout l’horizon de sa molle clarté, doucement, sans effort, comme une barque qui s’éloigne de la rive, Nyza se mit à chanter. D’abord sa voix trembla, incertaine et frêle, comme si elle allait se briser, puis peu à peu elle se déroula en ondes plus amples, pour s’élancer enfin, vibrante et pure, dans le silence étonné de la nuit.

Hyalis, fasciné, contemplait la vierge. Un rayon bleu descendait sur elle, et suivait son profil d’une ligne lumineuse ; ses bras et son cou semblaient de Marbre ; dans son visage immobile, ses lèvres seules frémissaient ; et ses yeux, levés au ciel, nageaient comme dans une extase d’argent. Elle descendit le degré du seuil, s’avança, fit quelques pas dans le jardin.

Hyalis entendait le bruit imperceptible des petits graviers que sa tunique entraînait