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au jardin de l'infante



Une Main invisible a béni l’horizon.
Moins d’animalité pèse sur les paupières ;
Et, comme un vieux captif enterré sous des pierres
L’âme un instant tressaille au fond de sa prison.


Et les grands yeux fiévreux dans les faces hachées,
Les pauvres yeux brûlés, dans un élan plaintif,
Comme des altérés boivent au ciel pensif,
Et les lèvres sont par le Silence touchées.


En robe héliotrope, et sa pensée aux doigts,
Le Rêve passe, la ceinture dénouée,
Frôlant les âmes de sa traîne de nuée,
Au rythme éteint d’une musique d’autrefois.


Les roses du couchant s’effeuillent sur le fleuve ;
Et, dans l’émotion pâle du soir tombant,
S’évoque un parc d’automne où rêve sur un banc
Ma jeunesse déjà grave comme une veuve…