pliants ! A-t-on oublié le peuple romain, parqué dans un édifice public[1], et mis en pièces, comme un vil troupeau ? Hélas ! combien les assassinats secrets, le meurtre des citoyens soudainement immolés dans les bras de leurs fils ou de leurs pères, la fuite des femmes et des enfants, le pillage des maisons, combien tout, eu un mot, était cruel et atroce avant ta victoire !
Et ce sont de telles horreurs que ces mêmes hommes t’invitent à renouveler ! Ainsi, nous n’aurions combattu que pour décider qui de César ou de Pompée pourrait à son gré commettre l’injustice ! la république n’aurait pas été recouvrée, mais envahie par toi ! les plus aguerries, les plus vaillantes de nos troupes, au terme de leurs travaux, auraient pris les armes contre leurs frères, leurs pères et leurs enfants, afin seulement que les plus vils des mortels trouvassent, dans les maux de leurs concitoyens, de quoi alimenter leur voracité et leur insatiable débauche, et couvrissent la victoire d’un tel opprobre, que la honte de leurs vices ternît la gloire des braves ! Car tu n’as sûrement point oublié de quelle manière et avec quelle retenue vivait chacun d’eux, quand la victoire était encore incertaine ; comment, au milieu des soins que la guerre réclamait, on voyait s’abandonner à des orgies ou à des prostituées, des hommes dont la vieillesse, dans le loisir même de la paix, n’eût pu, sans quelque opprobre, accorder un moment à la volupté.
- ↑ « In villâ publicâ, dans la métairie publique. » (Beauzée) « Entassés dans un parc (Debrosses). » Le massacre de six mille Romains que Salluste rappelle ici, eut lieu, par ordre de Sylla, dans l’hippodrome, proche du temple de Bellone, où le sénat était assemblé au même moment.