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Dès qu’en augmentant le nombre des membres de la cité, tu auras rappelé le peuple à l’exercice de ses droits, tous tes soins doivent tendre à ramener les bonnes mœurs et à cimenter la concorde entre les anciens et les nouveaux citoyens. Mais le plus grand des biens que tu puisses assurer à ta patrie, à tes concitoyens, à toi, à notre postérité, au genre humain, c’est d’éteindre ou d’affaiblir autant qu’il sera possible, la soif des richesses ; autrement les affaires domestiques ou publiques, civiles ou militaires, ne peuvent être bien administrées. Partout où la cupidité règne, la force des lois, les bonnes institutions et l’habileté deviennent impuissantes ; le génie même, tôt ou tard, finit par succomber.

L’histoire nous présente fréquemment des rois, des cités, des nations, perdant, au sein de l’opulence, de grands empires conquis par la vertu et la pauvreté. Rien de moins surprenant. Quand l’homme de bien voit les méchants plus considérés, plus honorés que lui, grâce à leurs richesses, il se trouble d’abord ; des doutes nombreux assiègent sa pensée. Mais lorsque, chaque jour davantage, le faste l’emporte sur l’honneur, et l’opulence sur la vertu, de l’empire de la raison, son âme tombe sous celui des passions. La gloire seule, il le faut avouer, est l’aliment de la vertu ; et celle-ci, sans la gloire, n’offre que difficultés et amertume. Enfin, où les richesses sont en honneur, là sont avilis tous les biens véritables, la bonne foi, la probité, la pudeur, l’innocence ; car la voie de la