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enseignerai la syntaxe. Pourquoi apprendre par cœur des règles ? Il vaut bien mieux apprendre des exemples, savoir les réciter sans broncher quand on vous en propose la traduction française. Une règle est toujours assez connue lorsque l’exemple qui en résume l’enseignement est présent à la mémoire. Moi-même Je lis couramment le latin et je l’écris avec facilité ; croyez-vous que je sache par cœur les règles ? Non, mais je me rappelle les exemples que j’ai appris à l’école et d’autres qu’y ont ajoutés mes lectures ; c’est à la lumière de ces phrases-types, si je puis dire, que je comprends les auteurs latins ou que je les imite. Vous me direz que vous ne songez pas à écrire en latin ; d’accord ; mais quand vous serez assez exercée pour bien traduire, vous aurez acquis sans vous en douter, et sans avoir pâli sur des thèmes, le savoir nécessaire pour écrire correctement, si le cœur vous en dit, rien qu’en faisant appel à vos souvenirs.

Les Grecs, nos maîtres, avaient raison de croire que Mnémosyne, la mémoire personnifiée, est la mère des neuf Muses. La mémoire seule, sans le jugement et la réflexion, ne suffit à rien, mais elle est indispensable à tout ; ceux qui disent qu’ils n’ont pas de mémoire sont des paresseux qui se trompent eux-mêmes, car comment auraient-ils pu, sans mémoire, apprendre le riche vocabulaire de la langue qu’ils parlent ? Il y a des mémoires