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reusement un troisième assaut dans leur ville d’Arracillum ; mais enfin cette place est emportée. Assiégés sur le mont Edule que les Romains avaient entouré d’une tranchée de quinze milles de circuit, et dont ils pressaient l’attaque de tous côtés, les Barbares, se voyant réduits aux dernières extrémités, avancent leur mort, au milieu d’un repas, par le feu, par le fer et par un poison qu’ils expriment communément de l’if (65) : c’est ainsi que la plus grande partie de ce peuple se sauva de la captivité qui la menaçait

La nouvelle de ces succès, dus à Antistius, à Furnius et à Agrippa, lieutenants de César, lui parvint dans ses quartiers d’hiver à Tarragone, place maritime. Il alla tout régler en personne, fit descendre les uns de leurs montagnes, exigea des autres des otages, et vendit le reste à l’encan, selon le droit de la guerre. Ces exploits furent jugés, par le sénat, dignes du laurier, dignes du char triomphal ; mais déjà César était assez grand pour pouvoir dédaigner ces honneurs.

En ce même temps, les Asturien, formant une armée considérable, étaient descendus de leurs montagnes. Leur mouvement n’eut pas la téméraire impétuosité qui caractérise les Barbares : campés près du fleuve Astura, et divisés en trois corps, ils se disposaient à attaquer les trois camps des Romains à la fois. Contre tant d’ennemis si courageux, et dont la marche était aussi inattendue que prudente, la lutte eût été douteuse et meurtrière : et plût aux dieux que la perte fût demeurée égale de part et d’autre ! Mais les Asturiens furent trahis par les Brigécins. Averti par ces derniers, Carisius vint au-devant de l’ennemi avec son armée. C’était comme une victoire d’avoir détruit leurs projets, bien que ce fût encore au prix d’un combat sanglant. Les débris de l’armée vaincue furent recueillis dans la très puissante ville de Lancia. On se battit sous les murs avec tant d’acharnement que nos soldats, maîtres de la place, demandaient des torches pour l’embraser ; le général n’obtint qu’avec peine qu’ils épargnassent cette cité, « qui, conservée, servirait bien mieux qu’incendiée de monument à leur victoire. »

Tel fut le terme des exploits guerriers d’Auguste ; tel fut celui des révoltes de l’Espagne. Cette province montra depuis une fidélité à toute épreuve et jouit d’une paix éternelle ; effet, soit du caractère de ses habitants devenus plus amis du repos, soit de la politique de César qui, redoutant la confiance que leur donnaient les montagnes où ils trouvaient une retraite, les contraignit de fixer leurs habitations et leur séjour dans les cantonnements établis dans la plaine. On ne tarda pas à reconnaître la sagesse de ces mesures. Toute cette contrée est naturellement fertile en or, en vermillon, en chrysocolle et en autres matières dont on fait les couleurs. César obligea ces peuples à exploiter un sol aussi fécond ; et ce fut, en cherchant pour les autres leurs propres trésors et leurs richesses, cachés dans les profondeurs de la terre, que les Asturiens commencèrent à les connaître.

Tous les peuples étaient en paix à l’occident et au midi ; au septentrion, depuis le Rhin jusqu’au Danube ; à l’orient, depuis le Cyrus jusqu’à l’Euphrate. Ceux même qui n’étaient pas soumis à notre empire sentaient cependant notre grandeur et révéraient, dans le peuple romain, le vainqueur des nations. Ainsi l’on vit les Scythes et les