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assiégés, loua leur valeur, fit des largesses à tous les vétérans, et, du haut de son tribunal, distribua les récompenses aux plus braves, selon leur mérite. Ensuite, laissant le proconsul Rébilus avec trois légions au siège de Thapsus, et Cn. Domitius avec deux autres au siège de Thysdra, où Considius commandait, il marcha sur Utique, après avoir envoyé devant M. Messala avec la cavalerie.

LXXXVII. Cependant la cavalerie de Scipion qui s’était sauvée de la bataille, avait pris la route d’Utique, et était arrivée à la ville de Parada. Les habitants, instruits par la renommée de la victoire de César, ayant refusé de la recevoir, elle entra de force, dressa un bûcher au milieu de la place, y jeta tous les meubles des habitants, et, après y avoir mis le feu, les y précipita eux-mêmes vivants et garrottés, sans distinction d’âge ni de sexe, les faisant ainsi périr du plus affreux supplice. De là elle se rendit en toute hâte à Utique. Peu auparavant, M. Caton, qui ne croyait pas cette ville fort dévouée à son parti, à cause des privilèges qui lui avaient été accordés par la loi Julia (10), en avait fait sortir la populace désarmée, et l’avait forcée à demeurer hors de la porte Belica, dans un camp entouré d’un faible retranchement, autour duquel il avait mis des gardes ; mais, pour le sénat, il le retenait dans la ville. La cavalerie de Scipion, n’ignorant pas que ce peuple favorisait le parti de César, attaque leur camp dès son arrivée, afin de venger, par leur mort, la honte de sa défaite ; mais ceux d’Utique, enhardis par la victoire de César, s’armèrent de pierres et de bâtons, et la repoussèrent. Alors, désespérant de s’emparer du camp, elle se jeta dans Utique, massacra un grand nombre d’habitants, pilla et ravagea leurs maisons. En vain Caton s’efforça d’empêcher ce désordre et d’engager les cavaliers à se joindre à lui pour défendre la place, et à s’abstenir du meurtre et du pillage : il vit ce qu’ils voulaient, et, pour les satisfaire, leur distribua à chacun cent sesterces. Faustus Sylla leur en donna autant de son propre argent, et partit d’Utique avec eux pour se rendre dans le royaume de Juba.

LXXXVIII. Cependant les fuyards ne cessaient d’arriver à Utique. Caton les ayant tous assemblés, ainsi que les trois cents citoyens qui avaient fourni de l’argent à Scipion pour faire la guerre, les exhorta à mettre les esclaves en liberté et à défendre la ville. Voyant que quelques-uns seulement goûtaient cet avis, et que les autres, effrayés et consternés, ne songeaient qu’à fuir, il laissa là sa proposition, et leur donna des vaisseaux pour aller où ils voudraient. Pour lui, après avoir mis ordre à tout, et avoir recommandé ses enfants à L. César, qui était alors son questeur, il se retira dans sa chambre comme pour prendre du repos, sans que rien sur son visage ni dans ses discours pût éveiller les soupçons ; et, ayant emporté secrètement son épée, il s’en traversa le corps. Comme il ne mourut pas du coup et qu’il tomba par terre, le bruit de sa chute fit accourir son médecin et ses domestiques qui n’étaient pas sans pressentiments. Ils voulurent fermer et bander sa plaie ;