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et déjà ils avaient fait un amas considérable de traits et de machines, et attiré une foule immense d’hommes. En outre, de vastes ateliers avaient été établis dans la ville. De plus, tous les esclaves qui étaient d’âge à servir avaient été armés, et ceux dont les maîtres étaient riches leur donnaient chaque jour la solde et la nourriture. Par cette multitude, bien distribuée, étaient défendues les fortifications des quartiers les plus reculés ; quant aux vieilles cohortes, elles étaient placées dans les postes les plus importants de la ville, et on les avait exemptées de tous travaux, afin qu’elles fussent toujours fraîches et prêtes à porter secours. On avait fermé toutes les rues et tous les carrefours par un triple rempart de quarante pieds de haut, et bâti en pierres équarries ; les parties basses de la ville étaient défendues par de très hautes tours à dix étages. Ils en avaient aussi construit d’autres toutes semblables, mais mobiles, qu’ils conduisaient sur des roues, au moyen de cordages et de chevaux, partout où il était nécessaire.

III. La ville, fort riche et abondamment pourvue, fournissait à tous ces préparatifs. D’ailleurs, les habitants, qui étaient on ne peut plus industrieux et adroits, exécutaient si bien tout ce qu’ils nous avaient vu faire, que nos ouvrages semblaient n’être qu’une copie des leurs. Ils inventaient aussi beaucoup de choses par eux-mêmes ; ils nous attaquaient et se défendaient tout ensemble. Du reste, dans les conseils et dans les assemblées, les principaux d’entre eux leur représentaient que le peuple romain prenait insensiblement l’habitude de s’établir dans ce royaume ; que peu d’années auparavant Gabinius était arrivé en Égypte avec une armée ; que Pompée, dans sa fuite, y avait cherché un asile ; que César y était venu avec des troupes ; que le meurtre de Pompée n’avait pas empêché César de séjourner parmi eux ; que s’ils ne le chassaient, leur royaume deviendrait une province romaine ; qu’il fallait se bâter, car le mauvais temps et la saison retenaient César et l’empêchaient de recevoir des secours par mer.

IV. Cependant une querelle s’étant élevée comme on l’a vu plus haut, entre Achillas, qui commandait aux vieilles troupes, et Arsinoé, fille cadette de Ptolémée, chacun deux cherchait à surprendre l’autre et à s’emparer du pouvoir : Arsinoé prévint Achillas en le faisant assassiner par l’eunuque Ganymède, son gouverneur. Par cette mort, se trouvant sans compétiteur, elle obtint seule toute l’autorité. Le commandement de l’armée est confié à Ganymède. Celui-ci accepte cette charge, fait de nouvelles largesses aux soldats, et pourvoit à tout avec une égale activité.

V. Alexandrie est presque tout entière minée, et a des canaux souterrains qui partent du Nil et par lesquels l’eau est conduite dans les maisons des particuliers, où, avec le temps, elle dépose et s’éclaircit peu à peu. Les maîtres et les domestiques n’usent d’aucune autre eau ; car celle qu’apporte le Nil est tellement trouble et limoneuse, qu’elle engendre toute sorte de maladies : cependant le