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du discours du général, étaient d’avis de garder ce même poste et de livrer bataille. (3) Mais César, n’ayant pas assez de confiance en des soldats encore troublés, voulut leur laisser le temps de remettre leurs esprits en quittant les retranchements ; et d’ailleurs il craignait fort pour les subsistances.

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(1) Ainsi, sans plus de retard, après avoir seulement pourvu au soin des blessé, et des malades, il fit partir du camp en silence, à l’entrée de la nuit, tout son bagage, et l’envoya devant Apollonia, avec défense qu’on s’arrêtât en chemin. Une légion fut commandée pour lui servir d’escorte. (2) Cela fait, il retint dans le camp deux légions, et, dès la quatrième veille, il fit sortir les autres par diverses portes, et les envoya devant par la même route. Après avoir laissé passer un moment, afin d’observer la discipline et pour que sa marche ne fût connue que le plus tard possible, il fit donner le signal du départ ; et, sortant alors lui-même, il rejoignit son arrière-garde, et fut bientôt hors de la vue du camp. (3) Pompée n’en fut pas plutôt informé qu’il se disposa à nous poursuivre. Se flattant encore de nous surprendre au milieu de l’embarras d’une marche, il sortit de son camp avec toute son armée, et envoya devant sa cavalerie pour arrêter notre arrière-garde ; mais elle ne pût l’atteindre, parce que César, marchant sans bagage, avait gagné du terrain. (4) Cependant, lorsqu’on fut arrivé au fleuve Génusus, dont les bords étaient escarpés, cette cavalerie atteignit et attaqua notre arrière-garde. (5) César lui opposa la sienne, parmi laquelle il mêla quatre cents soldats d’élite ; ils firent si bien leur devoir qu’ils repoussèrent les cavaliers ennemis, en tuèrent un grand nombre, et rejoignirent leur corps sans aucune perte.

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(1) Ayant fait ce jour-là tout le chemin qu’il s’était proposé, et l’armée ayant passé le Génusus, César s’arrêta dans son ancien camp vis-à-vis d’Asparagium, défendit aux soldats de sortir des retranchements, et envoya sa cavalerie au fourrage avec ordre de rentrer aussitôt par la porte décumane. (2) Pompée, qui avait fait ce jour-là le même chemin pour ne pas le perdre de vue, s’établit aussi à Asparagium dans son ancien camp. (3) Ses soldats, n’ayant rien à faire, puisque les fortifications étaient demeurées en leur entier, s’écartèrent pour aller au bois et au fourrage ; d’autres, qui avaient laissé au camp, à cause de la précipitation du départ, la plus grande partie de leurs effets et de leur bagage, encouragés par la proximité des lieux à les aller chercher, déposaient leurs armes dans leurs tentes et sortaient du retranchement. (4) César avait prévu qu’il en arriverait ainsi ; les voyant hors d’état de le poursuivre, il donna vers le midi le signal du départ, fit ce jour-là une double marche, et alla camper à huit mille pas plus loin ; ce que Pompée ne put faire, étant retenu par l’absence de ses soldats.

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(1) Le lendemain, César partit vers la quatrième veille, après avoir fait de même prendre les devants à son bagage à l’entrée de la nuit, afin que, s’il fallait combattre, l’armée n’eût