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ont fait leur devoir : lui, César, en s’abstenant de combattre alors qu’il avait un poste et une occasion favorables, afin de préparer toutes les voies à un accommodement ; son armée, en conservant et mettant à couvert de toute insulte les soldats ennemis qu’elle avait eus en son pouvoir, malgré une injure cruelle et le massacre des siens ; enfin les soldats d’Afranius, en venant traiter eux-mêmes de la paix, démarche inspirée par la pensée de pourvoir au salut de tous. (3) Ainsi, dans tous les rangs, on s’est arrêté au parti que la générosité conseillait : les chefs seuls ont montré de l’éloignement pour la paix ; loin d’observer les lois des trêves et des pourparlers, ils ont surpris nos soldats comme ils s’entretenaient avec les leurs sans défiance, et les ont massacrés cruellement. (4) Aujourd’hui il leur arrive ce qui est arrivé plus d’une fois aux hommes opiniâtres et arrogants, ils recherchent, ils sollicitent avec empressement ce que naguère ils dédaignaient. (5) Il ne se prévaudra maintenant ni de leur abaissement ni des circonstances favorables pour augmenter son pouvoir ; mais il veut que les armées qu’on a si longtemps entretenues contre lui soient licenciées. (6) En effet, ce n’est pas pour aucun autre motif qu’on a envoyé six légions en Espagne, qu’on y en a levé une septième, qu’on a équipé tant de flottes, et fait partir de si habiles généraux ; (7) rien de cela n’était nécessaire ni pour pacifier l’Espagne, ni pour venir en aide à la province qui, après une longue paix, n’avait besoin d’aucun secours : (8) c’est contre lui que toutes ces mesures ont été prises : c’est contre lui qu’on a établi des commandements d’une nouvelle espèce, en sorte que, des portes de Rome, le même homme préside aux délibérations intérieures ; et, quoique absent, gouverne depuis tant d’années deux provinces belliqueuses ; (9) c’est contre lui que les droits sacrés des magistrats ont été violés, et qu’au lieu de donner, selon l’usage, les gouvernements à des hommes sortant de la préture ou du consulat, on y a nommé des particuliers choisis par une faction ; c’est contre lui qu’au mépris des privilèges de l’âge, on rappelle au service des vétérans qui ont fait toutes les guerres précédentes ; (10) enfin, c’est à lui seul que l’on refuse ce que l’on a toujours accordé aux généraux qui avaient bien servi la république, de rentrer dans Rome avec honneur, ou du moins sans honte, et de congédier l’armée. (11) Tous ces outrages, il les a supportés et les supportera encore patiemment ; il n’a pas même l’intention de leur ôter leur armée pour la prendre sous ses ordres, ce qui cependant ne lui serait pas difficile ; mais seulement de les en priver pour qu’ils ne s’en servent pas contre lui. (12) Il faut donc, comme il a été proposé, qu’ils sortent de la province et licencient leurs soldats : à ce prix-là, il ne fera de mal à personne. Telle est l’unique et dernière condition qu’il met à la paix.

Licenciement de l’armée pompéienne

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(1) Ce discours fut très agréable aux soldats, comme il parut à la joie qu’ils témoignèrent : ils s’attendaient à quelque juste châtiment, et, ils recevaient leur congé comme une sorte de récompense. (2) Aussi, comme on agitait la question du lieu et de l’époque du licenciement, tous, du rempart où ils étaient alors, demandèrent de la voix et du geste qu’il se fît sur-le-champ ; si on le différait,