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environ, va se jeter dans le Rhin. Quant au Rhin, il prend sa source chez les Lépontes[1], habitants des Alpes, et traverse rapidement dans un long espace les terres des Nantuates, des Helvètes, des Séquanes, des Médiomatrices[2], des Triboques, des Trévires : lorsqu’il approche de l’Océan, il se divise en plusieurs branches, formant beaucoup de grandes îles, dont la plupart sont habitées par des nations féroces et barbares, parmi lesquelles il en est qui passent pour vivre de poissons et d’œufs d’oiseaux ; enfin, il se jette dans l’Océan par beaucoup d’embouchures.

XI. César n’était plus qu’à douze milles de l’ennemi, quand les députés revinrent, comme il avait été convenu ; l’ayant rencontré en marche, ils le supplièrent de ne pas aller plus avant. Ne l’ayant pas obtenu, ils le prièrent d’envoyer à la cavalerie qui formait l’avant-garde, l’ordre de ne pas commencer le combat, et de leur laisser le temps de députer vers les Ubiens ; en protestant que, si le sénat et les principaux de cette nation s’engageaient à les recevoir sous la foi du serment, ils accepteraient toute condition que César leur imposerait ; ils demandaient trois jours pour consommer cet arrangement. César pensait bien qu’ils sollicitaient ce délai de trois jours pour donner à leurs cavaliers absents le temps de revenir ; cependant il leur dit qu’il ne s’avancerait pas au-delà de quatre milles pour trouver de l’eau, et il leur recommanda de venir le lendemain en grand nombre, pour qu’il prît connaissance de leurs demandes. En même temps il envoya dire aux préfets qui marchaient en avant avec toute la cavalerie de ne point attaquer les ennemis, et, s’ils étaient eux-mêmes attaqués, de tenir seulement jusqu’à ce qu’il se fût rapproché d’eux avec l’armée.

XII. Mais, dès que les ennemis aperçurent notre cavalerie forte de cinq mille hommes, ils tombèrent sur elle, quoique la leur n’en eût pas plus de huit cents ; car ceux de leurs cavaliers qui étaient allés fourrager au-delà de la Meuse n’étaient pas encore revenus. Les nôtres étaient sans défiance, vu que les députés germains avaient quitté César peu auparavant et demandé une trêve pour ce jour-là. Cette attaque avait promptement mis le désordre parmi nous. Quand nous nous fûmes ralliés, les ennemis, selon leur coutume, mirent pied à terre, tuèrent plusieurs de nos chevaux, renversèrent quelques cavaliers, défirent le reste et les frappèrent d’une telle frayeur qu’ils ne s’arrêtèrent qu’à la vue de notre armée. Il périt dans ce combat soixante-quatorze de nos cavaliers. De ce nombre, fut Pison l’Aquitain, homme d’un grand courage et d’une naissance illustre, dont l’aïeul avait exercé le souverain pouvoir dans sa cité et reçu de notre sénat le titre d’ami. Accouru au secours de son frère, enveloppé par les ennemis, il l’avait arraché à ce danger ; renversé lui-même de son cheval, qui avait été blessé, il se défendit courageusement et aussi longtemps qu’il put. Lorsque entouré de toutes parts, et percé de coups, il eut succombé, son frère, déjà retiré de la mêlée, l’aperçut de loin, poussa son cheval vers les ennemis, s’offrit à eux et se

  1. Peuple du pays des Grisons.
  2. Pays messin et cantons de Sarguennes, Sarrelouis, Hombourg, Deux-Ponts Sal, et Bitche.