Page:Sallust - Traduction de Jean Baudoin, 1616.djvu/212

Cette page n’a pas encore été corrigée

appris chez M. Piſon te couſte la perte de ta pudicité ? Il ne faut donc pas s’eſtonner ſi tu vends ſi meſchamment ton eloquence, l’ayant acquiſe auec tant de vilennie.

Mais ie croy que c’eſt le luſtre de ta maiſon qui te rend ſi altier. Et neantmoins tu ſçais bien que ta femme eſt ſacrilege ; que chacun eſt abbreuué de ſes faux ſermens ; que ta fille deſrobbe à ſa mere les embraſſements que tu luy dois : Bref que tu en tires plus de plaiſir & d’obeyſſance qu’il n’appartient à vn pere.

N’eſt-il pas vray encore que la violence & les farcins t’ont mis en poffeffion de ta maiſon, qui t’eft vrayement funefte & aux tiens. Cela fuffit pour nous faire cognoiſtre, méchant que tu és, la grande reuolution de la Republique, puis que ta demeure eft dans la maiſon qui appartenoit iadis à Pub. Craffus, homme Confulaire.

Or bien que ces chofes foient telles, neantmoins Ciceron fe vente d’auoir affifté au Confeil des Dieux immortels, & qu’ils l’ont enuoyé d’enhaut pour garder cefte ville & les Citoyens fans reſpandre leur fang. Il tourne à fa propre louange tout le dommage que la ville de Rome a reçeu : comme fi ton Confu- lar, ô Tullius, n’auoit pas efté caufe de la Conjuration, & de la ruine que la Republique a foufferte, t’ayant eu pour fon deffen- feur… Pour moy ie fuis d’opinion que rien ne te rend orgueilleux à l’efgal de ces beaux aduis que tu pris auec ta femme Terentia fur le faict de la Republique, à l’iffuë de ton Confulat. C’eftoit alors que vous rendiez enfemble dans la maifon les iugemens de la Loy Plautia. Tu condamnois la plus-part des Conjura- teurs à la mort,.& quelques-vns à payer vne fomme d’argent : L’vn te faifoit baftir vne métairie au-Tufculan ; ou bien au chap Pompejen, & l’autre t’achetoit vne maiſon. Que fi quelqu’vn n’auoit moyen de le faire, il couroit fortune d’eftre fauffement accufé. Tu luy mettois en auant qu’il eſtoit venu forcer ta mai- fon, ou qu’il auoit dreffé des embufches.au Senat. Breftu nc manquois iamais d’accufations contre luy. Que fices reproches te femblent eftre des calomnies, dy-moy quels moyens t’ont laiflé tes deuanciers ; quel accroiffement ont pris tes richeffes par les procez ? Bref de quel argent tu as acquis ta maifon, & faict baftir auec tant de frais la métairie Tufcu- lane, & la Pompejenne ? Si tu ne fçais que refpondre, peut-on