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Les crimes souillant la surface
De quelques marais désastreux.

Souvent les Nymphes pastorales
Me l’avaient dit dans leur courroux :
« Aux régions des Cannibales
« Que vas-tu chercher loin de nous ?… »

Combien de fois dans ma pensée
J’ai dit, les yeux baignés de pleurs :
Ne verrai-je plus les couleurs
Du dieu qui répand la rosée ?

Les voilà, ces jonquilles d’or,
Ces violettes parfumées !
Jacinthes que j’ai tant aimées,
Enfin je vous respire encor !

Quelle touchante mélodie !
C’est Philomèle que j’entends.
Que ses airs, oubliés longtemps,
Flattent mon oreille attendrie !

J’ai vu le monde et ses misères ;
Je suis las de les parcourir.
C’est dans ces ombres tutélaires,
C’est ici que je veux mourir !

Je graverai sur quelque hêtre :
Adieu fortune, adieu projets !
Adieu rocher qui m’as vu naître !
Je renonce à vous pour jamais.

Que je puisse cacher ma vie
Sous les feuilles d’un arbrisseau,
Comme le frêle vermisseau
Qu’enferme une tige fleurie !

Amours, Plaisirs, troupe céleste,
Ne pourrai-je vous attirer,