Page:Sainte-Beuve - Portraits littéraires, t2, nouv. éd.djvu/271

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Durant cette année 1809, Fontanes, comme Grand-Maître, avait eu à lutter contre toutes sortes de difficultés et de dégoûts : de perpétuels conflits, soit avec le ministre de l’intérieur, duquel il se voulait indépendant, soit avec Fourcroy, resté directeur de l’instruction publique, et qui ne pouvait se faire à l’idée d’abdiquer, allaient rendre intolérable une situation dans laquelle la bienveillance impériale ne l’entourait plus. Il offrait vivement sa démission : « D’un côté, écrivait-il, je vois un ministre qui surveille l’instruction publique, de l’autre un conseiller d’État qui la dirige ; je cherche la place du Grand-Maître, et je ne la trouve pas. » Il récidiva cette offre pressante de démission jusqu’à trois fois. La troisième (c’était sans doute après le voyage de Fontainebleau), l’Empereur lui dit : « Je n’en veux pas, de votre démission ; s’il y a quelque chose à faire, exposez-le-moi dans un mémoire ; j’en prendrai connaissance moi-même ; j’y répondrai. » La rentrée ouverte de Fontanes dans les bonnes grâces du chef aplanit dès lors beaucoup de choses.

Dès septembre 1808, et aussitôt qu’il avait été nommé Grand-Maître, Fontanes avait songé à faire de l’Université l’asile de bien des hommes honorables et instruits, battus par la Révolution, soit membres du clergé, soit débris des anciens Ordres, des Oratoriens, par exemple, pour lesquels il avait conservé une haute idée et une profonde reconnaissance. Ces noms, suivant lui (et il les présentait de la sorte à l’Empereur), étaient des garanties pour les familles, des indications manifestes de l’esprit social et religieux qu’il s’agissait de restaurer. A cette idée générale se joignait chez lui une inspiration de bonté et d’obligeance infinie pour les personnes, qui faisait dans le détail sa direction la plus ordinaire. Il penchait donc pour un Conseil de l’Université très-nombreux, et il aurait voulu tout d’abord en remplir les places avec des noms que désignaient d’autres services. Ce n’était pas l’avis de l’Empereur, toujours positif et spécial. Nous possédons là-dessus une précieuse Note,