« Thérèse, qui vous amusez aux lueurs de votre esprit ; qui rêvez d’amour comme un autre de combats et de gloire, l’œil fier et jamais humide ;
« Thérèse, dont le regard, dans le cercle qui vous entoure de ses hommages, ne cherche personne ; que nul penser secret ne vient distraire, que nul espoir n’excite, que nul regret n’abat ;
« Thérèse, pour longtemps adieu ! car j’espérerais en vain auprès de vous de ce que votre cœur ne saurait me donner, et je ne veux pas de ce qu’il m’offre ;
« Car, où mon amour est dédaigné, mon orgueil n’accepte pas d’autre place ; je ne veux pas flatter votre orgueil par mes ardeurs comme par mes respects.
« Mon âge n’est point fait à ces empressements paisibles, à ce partage si nombreux ; je sais mal, auprès de la beauté, séparer l’amitié de l’amour ; j’irai chercher ailleurs ce que je chercherais vainement auprès de vous.
« Une âme plus faible ou plus tendre accueillera peut-être celui que d’autres ont dédaigné ; d’autres discours rempliront mes souvenirs ; une autre image charmera mes tristesses rêveuses, et je ne verrai plus vos lèvres dédaigneuses et vos yeux qui ne regardent pas.
« Adieu jusqu’en des temps et des pays lointains ; jusqu’aux lieux où la nature accueillera l’automne de ma vie, jusqu’aux temps où mon cœur sera paisible, où mes yeux seront distraits auprès de vous ! Adieu jusques à nos vieux jours ! »
Il sourirait à notre fantaisie de croire que la scène suivante se rapporte à quelque circonstance fugitive de la liaison dont elle aurait marqué le plus vif et le plus aimable moment. Quoi qu’il en soit, le tableau que Farcy a tracé de souvenir est un chef-d’œuvre de délicatesse, d’attendrissement gracieux, de naturel choisi, d’art simple et vraiment attique : Platon ou Bernardin de Saint-Pierre n’auraient pas conté autrement.