Les cantates de Rousseau jouissent encore d’une certaine réputation ; celle de Circé, en particulier, passe pour un beau morceau de poésie musicale. Elle nous paraît, à nous, exactement comparable pour l’harmonie à un chœur médiocre de libretto. Nul rhythme, nulle science même dans ces petits vers si célèbres, et où fourmillent les banalités de redoutable, formidable, effroyable, de terreur, fureur et horreur. Le caractère de la magicienne est aussi celui d’une Circé ou d’une Médée d’opéra ; elle ne ressemble pas même à Calypso, et ne sort pas des fadaises et des frénésies dont Quinault a donné recette. Jean-Baptiste avait probablement oublié de relire le dixième livre de l’Odyssée, ou même, s’il l’avait relu, il y aurait saisi peu de chose ; car il manquait du sentiment des époques et des poésies, et s’il mêlait sans scrupule Orphée et Protée avec le comte de Luc, Flore et Cérès avec le comte de Zinzindorf, il n’hésitait pas non plus à madrigaliser l’antiquité, et à marier Danchet et Homère. Depuis qu’on a le Men-
- ↑ La plus belle ode que l’on doive à J.-B. Rousseau est peut-être encore celle de Le Franc sur sa mort ; la meilleure pièce lyrique du genre en est l’épitaphe. Nul mieux que lui ne semble propre à vérifier ce propos du malin : Faute d’idée, il allait faire une ode !