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MADAME DE LA FAYETTE. 257

Henriette, qui, alors en exil, s’y était retirée. Quand la jeune princesse fut devenue Madame et l’ornement le plus animé de la cour, Mme de La Fayetle, bien que de dix ans son aînée, garda l’ancienne familiarité avec elle, eut toujours ses entrées particulières et put passer pour sa favorite. Dans l’histoire charmante qu’elle a tracée des années brillantes de cette princesse, parlant d’elle-même à la troisième personne, elle se juge ainsi : « Mlle de La Trimouille et Mme de « La Fayette étoient de ce nombre (du nombre des personnes « qui voyaient souvent Madame). La première lui plaisoit par « sa bonté : et par une certaine ingénuité à conter tout ce • qu’elle avoit dans le cœur, qui ressentoit la simplicité des « premiers siècles ; l’autre lui avoit été agréable par son « bonheur ; car, bien qu’on lui trouvât du mérite, c’étoit une « sorte de mérite si sérieux en apparence, qu’il ne sembloit « pas qu’il dût plaire à une princesse aussi jeune que Madame. » A l’âge d’environ trente ans, Mme de La Fayette se trouvait donc au centre de cette politesse et de cette galanterie des plus florissantes années de Louis XIV ; elle était de toutes les parties de Madame à Fontainebleau ou à Saint-Cloud ; spectatrice plutôt qu’agissante ; n’ayant aucune part, comme elle nous dit, à sa confidence sur de certaines affaires, mais, quand elles étaient passées et un peu ébruitées, les entendant de sa bouche, les écrivant pour lui complaire : « Vous écrivez bien, lui disait Madame ; écrivez, je vous fournirai de bons mémoires. » — «C’était un ouvrage assez difficile, avoue Mme de La Fayette, que de tourner la vérité en de certains endroits d’une manière qui la fit connaître, et qui ne fût pas néanmoins offensante ni désagréable à la princesse. » Un de ces endroits, entre autres, qui aiguisaient toute la délicatesse de Mme de La Fayette et qui excitaient le badinage de Madame pour la peine que l’aimable écrivain s’y donnait, devait être, j’imagine, celui-ci : « Elle (Ma- «dame ) se lia avec la comtesse de Soissons... et ne pensa « plus qu’à plaire au roi comme belle-sœur ; je crois qu’elle