borné à ne point l’étaler), — c’est ainsi qu’on apprend à regret de nos respectables biographes qu’un jour (un seul jour, il est vrai[1]), des vêtements de drap, trop longtemps portés, produisirent un vilain effet pour la mère Angélique ; que telle autre Sœur (Anne-Eugénie Arnauld), qui avait été fort brave dans le monde, écura un moment les poêles et chaudrons du monastère ; que mademoiselle d’Elbeuf, novice, ravalait sa qualité de princesse et de petite-fille de Henri IV[2], jusqu’à raccommoder les souliers des religieuses ; que M. Hamon allait volontiers en guenilles, et qu’il mangeait en cachette du pain des chiens, donnant le sien aux pauvres ; qu’il y eut un jour à dater duquel M. de Pontchâteau ne changea plus de chemise… En ai-je dit assez ? êtes-vous contents[3] ? Remarquez bien toutefois qu’il y aurait encore plus d’inexactitude véritable et d’infidélité à venir afficher ces pratiques secrètes, qu’à ne les indiquer qu’avec réserve et en les voilant ; car ces pieux personnages pouvaient faire tout cela ; mais ils ne le disaient pas, et il ne fallait pas qu’on nous le dit. Il y a dans ce seul récit manque de goût, et de goût en matière morale ; c’est violer leur humilité. Ces détails tout corporels,
- ↑ Et dans les tout premiers commencements.
- ↑ De Henri IV et de Gabrielle d’Estrées, dont sa mère était fille.
- ↑ Et puisque je suis en train de défiler ces misères, voici un trait encore, moins désagréable. La mère Angélique écrivait en décembre 1652 à la Reine de Pologne, Marie de Gonzague : « Je ne suis pas moins joyeuse que surprise de ce qu’il plaît à Votre a Majesté de nous dire qu’elle n’est qu’un quart d’heure et demi à s’habiller. » Un quart d’heure et demi, c’est-à-dire vingt ou vingt-trois minutes, c’était bien peu en effet pour une reine, et surtout qui avait été tellement dans les élégances et les coquetteries dès sa jeunesse. La mère Angélique paraît elle-même s’étonner que ce temps suffise à une semblable toilette. Je soupçonne que M. d’Andilly devait bien mettre au moins un quart d’heure à la sienne.