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XV


Conséquences morales des Provinciales. — De la morale dite des honnêtes gens ; — divers temps de sa formation ; — Molière après Pascal. — Le Tartufe dans un salon janséniste. — Caractère de Molière ; — en quoi supérieur à Montaigne. — Molière plus triste que Pascal. — Idée d’un entretien entre tous les deux.


Il va sans dire que je ne prétends pas que les Provinciales aient produit toutes ces conséquences dans lesquelles je vais entrer. Je fais remarquer seulement qu’elles y sont pour une grande part, pour une part certaine, bien qu’indéterminée.

Les Provinciales ont tué la scolastique en morale, comme Descartes y a coupé court en métaphysique ; elles ont beaucoup fait pour séculariser l’esprit et la notion de l’honnête, comme Descartes pour introduire et instituer décidément l’esprit philosophique. Le Casuisme, à le bien prendre, n’était souvent qu’une forme de sophisme et de mauvais goût appliquée à la théologie morale, et propre surtout au génie espagnol de ce siècle ; on en avait infecté la France, et il l’en fallait purger. Pascal fit œuvre de goût en matière de mœurs. Sans les Provinciales, ce résultat, dû à tout un ensemble de pro-