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LIVRE TROISIÈME.

paroles de saint Augustin sur le Psaume 118 se présentèrent à son esprit : « Puisqu’ils n’ont persécuté en moi que la Vérité, secourez-moi donc, Seigneur, afin que je combatte pour la Vérité jusqu’à la mort. » — Aussitôt après il se cacha et fit bien, car il n’aurait pas évité la Bastille. On lit dans un petit journal manuscrit de M. de Pontchâteau, qui se rapporte à ce moment :

« Du dimanche 20" febvrier (1656).
« M. Tassin, petit bedeau de la Faculté, a dit ce matin à M. Manessier qu’il savoit de bonne part qu’on cherchoit partout M. Arnauld pour le prendre, et qu’il y avoit des gens qui passoient pour cela des deux et trois heures la nuit dans les lieux où ils croyoient pouvoir surprendre quelqu’un et en apprendre des nouvelles.
« Les ennemis de M. Arnauld disent partout qu’il est excommunié[1]. »


    comme plus à proximité des nouvelles; mais une phrase de M. de Pontchâteau, précédemment citée (page 75), semble indiquer qu’Arnauld resta à Port-Royal des Champs jusqu’après la Censure.

  1. Au tome second des Mémoires manuscrits de Beaubrun. — Et (manuscrits de la Bibliothèque de Troyes) dans une lettre à M. de Saint-Gilles, datée du 9 febvrier, cinq heures du matin, le même M. de Pontchâteau, si actif en ce moment de crise, disait:« … Surtout qu’on cache bien ceux qui le doivent être. On me dit hier au soir, une personne fort amie et fort affectionnée, — on m’a dit que M. A… (Arnauld) n’est pas assez bien caché. Pour moi je ne veux pas songer où il est, car si j’y songeois, je le devinerois aisément. Il ne sera jamais bien caché, à moins qu’il n’y ait qu’une seule personne qui y aille et qui le sache; et pour cela il faudroit avoir quelqu’un qui fût inconnu, qui ne demeurât pas à Port-Royal, mais plutôt avec lui, et qui n’eût pas la mine d’un homme à (faire) dire:En voilà un. J’avois songé à M. Dessaux, qui pourroit même être habillé de noir ; et il faudroit encore, ce me semble, que cette personne n’allât point à Port-Royal, ou au moins que rarement, mais avoir une maison tierce en ville où on mît de part et d’autre les paquets et les lettres; car certainement les Molinistes et Jésuites sont enragés contre notre petit Père… » M. de Pontchâteau finissait en disant que la seconde Lettre provinciale est admirable et fait des effets merveilleux:« Elle rend entièrement ridicule Madame la Faculté, et surtout les Pères Dominicains, qui se repentiront