Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t2, 1878.djvu/275

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
265
LIVRE DEUXIÈME.

bouillet, à celle des Gomberville, des Chapelain, des Godeau, des Scudéry. Je ne toucherai ici que deux ou trois de ces noms, et en ce qui est moins connu.

Gomberville, par exemple, était devenu tout à fait janséniste et ami de Port-Royal. On a de ses quatrains sur la retraite de M. Le Maître, sur celle de M. de Pontis. Ses meilleurs vers sont ceux qu’il fit sur les désirs de retraite que ressentait l’abbé de Pontchâteau : on les aura en leur lieu. Retiré lui-même dans l’île Saint-Louis, marguillier de sa paroisse, il pleurait le mal qu’il s’imaginait avoir fait par son roman de Polexandre, et il aurait voulu le réparer en composant des romans plus ou moins chrétiens à la façon de l’évêque de Belley : ainsi sa Jeune Alcidiane, qu’il n’acheva pas. Par une contradiction assez naturelle, en même temps qu’il s’exagérait et se plaisait à exagérer aux autres le mal qu’avait causé cet innocent Polexandre, il n’aimait pas trop que les autres le félicitassent trop nettement de son repentir. Un jour le médecin Dodart y fut pris ; il lui disait ou à peu près : « Je suis bien aise de voir qu’enfin vous regrettez le mal produit par ces détestables

    sultèrent aussitôt pour se mettre en règle et en mesure à i’égard de la veuve. L’affaire transpira ; les ennemis des Jansénistes s’en emparèrent. On essaya toutes sortes d’arbitrages, gens de Parlement, docteurs de Sorbonne, casuistes. L’examen des papiers ne laissait aucun doute ; des notes du défunt au dos des papiers disaient beaucoup. Le reste était le secret de M. Singlin, le secret de la confession. Mais madame de Chavigny jetait les hauts cris et faisait parler l’intérêt de ses treize enfants. On voulut se rabattre à cent mille livres à distribuer aux pauvres. Les dépositaires, sans donner dans cet accommodement, renoncèrent à tout et remirent la charge de conscience sur la famille : la veuve, rentrée dans ses fonds, s’en consola. (Hermant, Histoire manuscrite, tome I, p. 673 ; et Lettres de la mère Angélique, tome II, p. 195, 200, 238.) — On remarqua à Port-Royal que M. de Chavigny était mort le 11 octobre, le jour précisément de la mort de M. de Saint-Cyran, qu’il avait tant contribué à faire sortir de Vincennes : on y vit un signe d’espérance. — (Voir à l’Appendice.)