touchante adressée par lui à l’un de ses amis et datée du jour de la Toussaint 1643 ; il y explique et y justifie sa résolution : « Quoi que l’on m’objecte, je maintiens devant Dieu qu’il m’étoit impossible de penser sérieusement à une affaire si importante, demeurant dans l’embarras de ma vie ordinaire, au milieu de mes connoissances et de mille occasions dont j’ai trop éprouvé le péril ; quiconque l’a entrepris de la sorte n’y a point réussi… » Parlant de cette vie de demi-désir où les bonnes pensées étaient insuffisantes, il ajoute : « Néanmoins, la facilité commune l’emportoit, et je disois à peu près comme ce malheureux : Fasse le mieux qui pourra, pour moi je me contente de faire le bien ! Du depuis je me suis défié de cette maxime, et ai cru que nous ne pouvions trop faire pour nous sauver, ni négliger les conseils que Dieu nous donnoit pour cela : ce qu’il m’a, peu à peu, si fort imprimé dans l’esprit, qu’enfin ma dernière touche est venue. » Agréable et très-juste image ! — Et encore : « Je vous déclare que rien ne m’a rendu ma vie ordinaire plus suspecte que la douceur avec laquelle je la passois ; il n’y a que les innocents qui en puissent goûter une semblable sans crainte ; mais un pécheur tel que je suis doit extrêmement appréhender ce silence de Dieu … Comme j’ai abusé des choses légitimes, il faut aussi que j’en souffre la privation volontaire… Ceux qui doivent beaucoup sont obligés de s’incommoder pour s’acquitter. » Il témoigne, en finissant, sa douleur d’être réduit à se priver de la compagnie de ses amis si chers : « Oui, l’affection que je dois à de si bons parents et amis redouble ma haine contre le péché, qui me fait cacher. Ce n’est point par exagération que je vous parle… ; la considéra-
débauches de trente années ; mais, à prendre le mot dans le sens mystique et pénitent, il n’y aurait pas contradiction : il se considère comme en état de péché depuis trente ans, c’est-à-dire depuis l’âge de sept ans, qui est réputé l’âge de raison commençante.