Et même d’un peu mieux, dit-on.
Nous voici, ce semble, bien loin de Port-Royal ; — pas si loin que l’on croit. Milord Muskry (ou Muskerry), l’un des plus grands seigneurs catholiques d’Irlande, et milord Hamilton, durant la révolution d’Angleterre, avaient passé en France pour conserver leur foi ; les épouses de ces seigneurs les avaient précédés avec leurs enfants. Mesdemoiselles Hamilton et Muskry furent mises à Port-Royal ; elles durent y être dès avant 1655. Mademoiselle Hamilton, qui devint la comtesse de Grammont, celle même que l’on voit faire si charmante, si noble, et pourtant si espiègle figure à la Cour de Charles II, était donc une élève de Port-Royal, et une élève fidèle et chérie. M. Callaghan, prêtre irlandais, de ses parents, a pris place parmi les solitaires, les amis et les théologiens de Port-Royal. Au moment où le chevalier de Grammont se trouva si ébloui d’un coup d’œil, à ce bal de la reine où il la vit de près pour la première fois, elle n’avait guère quitté notre monastère que depuis deux années. L’éducation qu’elle y avait reçue, sans lui donner précisément de ces grâces, mais aussi sans les lui ôter, avait contribué sans doute à les nourrir de sérieux et à consolider son esprit délicat. Les profanes Mémoires disent d’elle en effet (je saute les détails par trop touchants sur le physique de sa beauté) : « … Son esprit étoit à peu près comme sa figure ; ce n’étoit point par ces vivacités importunes dont les saillies ne font qu’étourdir, qu’elle cherchoit à briller dans la conversation. Elle évitoit encore plus cette lenteur affectée dans le discours, dont la pesanteur assoupit ; mais, sans se presser de parler, elle disoit ce qu’il falloit, et pas davantage. Elle avoit tout le discernement imaginable pour le solide et le faux brillant ; et, sans se parer à tout propos des lumières de