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qu’ils aient entamé un grand emploi par des bagatelles. » C’est à propos d’Alexandre VII (Chigi) qui entama son pontificat par des puérilités de cérémonial que Retz fait cette remarque, laquelle se pourrait généraliser et varier. Les puérilités de Richelieu n’étaient que des intermèdes à sa politique, comme ces ballets d’un soir, comme ces comédies d’enfants auxquelles il se délassait : elles ne contre-carraient jamais cette politique, elles y aidaient quelquefois. Dans le cas présent, la question d’attrition ne venait dans son esprit contre M. de Saint-Cyran qu’à l’appui d’une autre grande raison d’État qu’elle aiguillonnait, bien loin de l’entraver. Une circonstance récente et précise y avait irrité sa colère.

Louis XIII, ce prince mélancolique et dévot, mais qui n’aimait rien, vivait dans des craintes continuelles autant de Dieu que des hommes. Il importait à Richelieu de l’apaiser, au moins du côté de Dieu, et de lui persuader que tant de pur amour n’était pas entièrement nécessaire à l’absolution. Tous les amours purs se tiennent : Louis XIII ne s’était jamais senti plus près d’aimer Dieu que dans les moments où il aimait mademoiselle de La Fayette. Le Père Caussin, son confesseur d’alors, et qui favorisait ce chaste amour humain, lui demandait en même temps, chaque fois qu’il le confessait, des actes d’amour de Dieu. Mais cette liaison avec mademoiselle de La Fayette, s’étant venue compliquer de politique et de remords pour le roi d’avoir chassé sa mère, fut découverte et brisée sur l’heure par le Cardinal ; mademoiselle de La Fayette entra à la Visitation ; le Père Caussin, trop simple, est-il dit, pour un jésuite de Cour, fut exilé à Quimper-Corentin (ultima Thule). Quelques mois étaient à peine écoulés depuis cette révolution de confessionnal, lorsqu’un jour, un peu après Pâques de l’année 1638, le roi, qui avait lu un