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PORT-ROYAL.

et, par une sainte émulation, ils se donnoient l’un à l’autre ces coups d’ailes dont parle saint Grégoire, pour s’exciter et s’animer à la vertu.»

Bossuet, en maint de ses beaux endroits, a bien souvent imité ou simplement traduit Chrysostome : mais ne voilà-t-il pas, dans cette humble page de récit et dans ces vies commençantes de solitaires, saint Chrysostome, saint Basile et saint Grégoire imités et reproduits, et d’une imitation originale aussi, et non pas pour la pensée seulement, mais pour l’action même ? Je reviens à ma proposition déjà énoncée, et je tâche, en l’étendant, de la rendre de plus en plus précise et significative :

Au dix-septième siècle, ce que Racine est à Sophocle ou à Euripide, ce que Bossuet est à saint Chrysostome, Port-Royal, avec ses relations et ses solitaires, l’est à saint Grégoire, à saint Basile, à saint Jérôme, à saint Éphrem, à saint Eucher, à tout ce côté pénitent, et studieux dans la pénitence, de l’antiquité chrétienne et des Pères, lequel, sans Port-Royal, — et même Bossuet, Bourdaloue et Fénelon existant, — n’aurait pas été alors reproduit suffisamment ni représenté.

M. de Séricourt ne devint pas un écrivain en devenant un pénitent, ou du moins il ne fut écrivain que dans le sens matériel du mot : il se contentait d’offrir sa main pour copier (ce qu’il faisait admirablement, dit-on,) les ouvrages de son frère M. Le Maître et de son oncle M. Arnauld. Ce travail de transcription, qui avait joué un si grand rôle dans les cloîtres des vieux âges comme moyen d’étude et de sanctification, et que l’imprimerie semblait avoir naturellement supprimé, se retrouve en usage à Port-Royal avec tant d’autres exercices pieux du passé. Ce qu’on y a copié d’écrits de toutes sortes est prodigieux. Plusieurs des solitaires et quelques-unes des sœurs s’y employaient ; et, au soin, à la netteté de