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NOTES ET SONNETS.

Qu’au loin Saint-Pierre en noir rompait seul de son front.
Près de nous votre Hermann, si fier de vous, ô Maître,
Le Puzzi d’autrefois et de ce soir peut-être[1],
S’égayait, bondissait, et d’un zèle charmant
Mêlait aux questions fleur, médaille, ossement.
À deux pas en sortant, une rixe imprudente
D’enfants, nu-tête au ciel, se détachait ardente,
Les cheveux voltigeant comme d’Anges en feu ;
Des rameaux d’un cyprès un chant disait adieu ;
Et toutes ces beautés qu’arrivant et novice
Amplement j’aspirais dans non âme propice,
Mais où vous me guidiez, où vous m’aidiez encor,
Vous du si petit nombre à qui sied l’archet d’or,
Souvenirs que par vous il vaut mieux qu’on entende,
Du premier jour au cœur m’ont fait Rome plus grande !


ÉLÉGIE


Pour de lointains pays (quand je devrais m’asseoir)
Je vais, je pars encor : que veux-je donc y voir ?
Est-ce des nations la pompe ou les ruines ?
Est-ce la majesté des antiques collines
Qui me tente à la fin et me dit de monter ?
Est-ce l’Art, l’Art divin, qui, pour mieux m’enchanter,
Pour remplir à lui seul mon âme tout entière,
Veut que je l’aille aimer sous sa belle lumière ?
Est-ce aussi la nature et ses calmes attraits

  1. Hermann, l’élève de Listz, désigné enfant sous le nom de Puzzi dans les Lettres d’un Voyageur. — Depuis il s’est fait moine.