La violette rit dans son rare gazon ;
La neige brille aux monts sans insulter la plaine.
Que d’aspects assemblés ! sur la hauteur prochaine
Ce massif de bois nu, dans sa sobre saison ;
En bas le lac limpide, où nagent sans frisson
Les blancs sommets tout peints d’un bleu de porcelaine.
Pauvre orage de l’âme, où donc est ta rigueur ?
Qu’as-tu fait de tes flots, orage de mon cœur ?
Je sens à peine en moi les rumeurs expirantes.
J’aime ce que j’aimais ; un souvenir pieux
Sur ces coteaux nouveaux me redit d’autres lieux,
Et je songe au passé le long des eaux courantes.
III
Et je songe au passé, peut-être à l’avenir,
Peut-être au bonheur même en sa vague promesse,
Au bonheur que promet un reste de jeunesse,
Et qu’un cœur pardonné peut encore obtenir.
Pardonne-lui, Seigneur, et le daigne bénir ;
Retiens sa force errante, ou force sa faiblesse,
Pour qu’en toute saison ton souffle égal ne laisse
Ni désir insensé, ni trop cher souvenir.
Qu’il se reprenne à vivre, en espoir de la vie ;
Que, sans plus s’enchainer, il trouve qui l’appuie,
Qui lui rapprenne à voir ce qu’il s’est trop voilé ;