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LES CONSOLATIONS.

Le Maitre qui tient la balance
N’a compris que mieux son silence ;
Ô mortels, ne le blâmez pas !

Celui qu’invoquent nos prières
Ne fait pas descendre les pleurs
Pour étinceler aux paupières,
Ainsi que la rosée aux fleurs ;
Il ne fait pas sous son haleine
Palpiter la poitrine humaine
Pour en tirer d’aimables sons ;
Mais sa rosée est fécondante,
Mais son haleine immense, ardente,
Travaille à fondre nos glaçons.

Qu’importe ces chants qu’on exhale,
Ces harpes autour du saint lieu ;
Que notre voix soit la cymbale
Marchant devant l’arche de Dieu ;
Si l’âme trop tôt consolée,
Comme une veuve non voilée,
Dissipe ce qu’il faut sentir ;
Si le coupable prend le change,
Et, tout ce qu’il paie en louange,
S’il le retranche au repentir ?