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DE JOSEPH DELORME.


VI

RONDEAU


À UNE BELLE CHASSERESSE.


Doux Vents d’automne, attiédissez l’amie !
Vaste Forêt, ouvre-lui tes rameaux !
Sous les grands bois la douleur endormie,
En y rêvant, souvent calma ses maux.
Aux maux plus doux tu fus hospitalière,
Noble Forêt ! ici vint La Vallière ;
Ici Diane[1], en ces règnes si beaux ;
Et la charmille éclatait aux flambeaux.
La chasse court, le cerf fuit, le cor sonne :
Pour prolonger ce que l’ombre pardonne,
Vous ménagiez le feuillage aux berceaux,
Doux Vents d’automne.

Ô ma Beauté, n’y soupirez-vous pas ?
Pourquoi ce cri vers le désert sauvage ?
Sur son coursier la voila qui ravage
Rocs et halliers, et franchit tous les pas.
Cœur indompté, l’air des bois l’aiguillonne,
L’odeur des pins l’enivre. Ah ! c’est assez ;
Quand la forêt la va faire amazone,
Soufflez sur elle et me l’attiédissez,
Doux Vents d’automne.


  1. Diane de Poitiers : il s’agit de Fontainebleau