Page:Sainte-Beuve - Poésies 1863.djvu/195

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
185
DE JOSEPH DELORME.


Qui, des rayons de feu que lance ma paupière,
Réfléchisse en ses pleurs la tremblante clarté,
Et sans orage au ciel, sans trop vive lumière,
Se lève sur le soir de mon rapide été !

Que l’oubli du passé me vienne à côté d’elle ;
Que, rentré dans la paix, je craigne d’en sortir…
Que cet amour surtout, bien que noble et fidèle.
Au cœur pieux des miens n’aille pas retentir !


II

DÉSIR


Eh quoi ! ces doux jardins, cette retraite heureuse,
Qui des plus chers désirs de mon âme amoureuse
Enferme les derniers ;
Beaux lieux dont je n’ai vu que l’enceinte, bordée
De mélèzes en pleurs et d’arbres de Judée
Et de faux-ébéniers ;

Bosquets voilés au jour, secrètes avenues,
Dont je n’ai respiré les odeurs inconnues
Que par la haie en fleur ;
Au bord desquels, poussant mon alezan rapide,
J’ai souvent en chemin cueilli la feuille humide
Pour la mettre à mon cœur ;

Quoi ! ces lieux de son choix, ces gazons qu’elle arrose.
Ces courbes des sentiers dont à son gré dispose
Un caprice adoré ;