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DE JOSEPH DELORME

Entends l’alcyon sur les ondes,
Ou les soupirs des vierges blondes,
Ou l’astre qui chante : Hosanna !

Sais-tu qu’il est dans la vallée,
Bien bas à terre, un cœur souffrant,
Une pauvre âme en pleurs, voilée,
Que ta venue a consolée
Et qui sans parler te comprend ?

J’aime tes chants, harpe éternelle !
Astre divin, cher au malheur,
J’aime ta lueur fraternelle !
As-tu vu l’ombre de ton aile,
Beau cygne, caresser la fleur ?

Est-ce assez pour moi que mon âme
Frémisse à ton chant inouï ;
Qu’écoutant tes soupirs de flamme,
Comme à l’ami qui la réclame,
Dans l’ombre elle réponde : Oui ;

Qu’aux voix qu’un vent du soir apporte
Elle mêle ton nom tout bas,
Et ranime son aile morte
À tes rayons si doux…, qu’importe,
Hélas ! si tu ne le sais pas ?

Si dans ta sublime carrière
Tu n’es pour elle qu’un soleil
Versant au hasard sa lumière,
Comme un vainqueur fait la poussière
Aux axes de son char vermeil ;