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l’est par la langue, dans une Genevoise qui a publié, depuis bien des années, quantité d’écrits remarquables, saisissants, éloquents avec une pointe d’étrangeté : il me faut bien la nommer, quoiqu’elle n’ait point inscrit son nom en tête de tous ses nombreux et piquants ouvrages ; elle voudra bien m’excuser de cette liberté, car je ne suis pas comme M. de Rémusat qui, dans la Revue des Deux Mondes, a pu parler d’elle hier à merveille et à fond, en toute discrétion cependant, pour des lecteurs déjà au fait et initiés aux sous-entendus. Nous autres gens du moins beau monde, nous avons besoin qu’on nous parle clair et de savoir vite et avec netteté de qui il s’agit. Or, Mme la comtesse Agénor de Gasparin, — c’est elle en toutes lettres, — femme d’un homme de cœur et d’un homme de bien, Genevoise de famille et de naissance, de la haute bourgeoisie ou de l’aristocratie de cette république (c’est tout un), passant certaines saisons à Paris, mais établie et vivant plus ordinairement en son château ou manoir au pied du Jura suisse, dans le canton de Vaud, dans le pays de Claire d’Orbe, a publié, en ces dernières années surtout, une série d’esquisses, d’impressions morales ou pittoresques, de tableaux paysanesques ou alpestres avec intention et inspiration chrétienne très-marquée[1], toute une

  1. Les Horizons prochains ; — les Horizons célestes ; — Vesper ; — les Trislesses humaines ; et aujourd’hui enfin les Prouesses ou Voyages de la Bande du Jura, c’est-à-dire de la société active, honnête, rieuse et vaillante, amoureuse de la nature, amoureuse des œuvres de Dieu, qui se réunit et se groupe chaque été autour de la châtelaine de Valleyres. — (Michel Lévy.)