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tables Anciens, avec ceux dont nous n’avons la statue qu’à demi brisée. On est donc réduit à commenter Pœzivre, à l’admirer, à rêver l’auteur et le poëte à travers. On peut refaire ainsi des figures de poëtes ou de philosophes, des bustes de Platon, de Sophocle ou de Virgile, avec un sentiment d’idéal élevé ; c’est tout ce que permet l’état des connaissances incomplètes, la disette des sources et le manque de moyens d’information et de retour. Un grand fleuve, et non guéable dans la plupart des cas, nous sépare des grands hommes de I’Antiquité. Saluons-les d’un rivage à l’autre. Avec les modernes, c’est tout différent ; et la critique, qui règle sa méthode sur les moyens, a ici d’autres devoirs. Connaître et bien connaître un homme de plus, surtout si cet homme est un individu marquant et célèbre, c’est une grande chose et qui ne saurait être à dédaigner.

Uobservation morale des caractères en est encore au détail, aux éléments, à la description des individus et tout au plus de quelques espèces : "fhéopliraste et La Bruyère ne vont pas au delà. Un jour viendra, que je crois avoir entrevu dans le cours de mes observations, un jour où la science sera constituée, où les grandes familles d’esprits et leurs principales divisions seront déterminées et connues. Alors le principal caractère d’un esprit étant donné, on pourra en déduire plusieurs autres (1). Pour l’homme, sans doute, on ne pourra (11) <1 Il y a dans les caractères une certaine nécessité, certains rapports qui font que tel trait principal entraîne tels traits secondaires. » GŒTHB‘ (Conversations d’Eckermann