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LIVRE D’AMOUR. r, Maistout s’évanouitbientôt dans le sommeil, Et je ne sentaisplus de blessureau réveil. Amour,où donces-tu ? descends , vautour sublime. ; J’étalerai mon cœur pour qu’il soit ta victime ; Je t’ouvrirai ma veineet mon flanctout fumant ; Docileà ton essor, commeun créduleamant, J’irai, j’irai partout où monteraton aile ; Je chérirai sans fin ta morsureéternelle. Tu me seras léger et doux, maître adoré ! Jamais gazonflétri, jamaissablealtéré, Jamaisguerriersmourantsdont la plaine est jonchée N’ont plus avidementbu la pluieépanchée Que moi, rôdant, la nuit, aux lieux les plus déserts, Je ne boirai mes pleurscuisants, mes pleurs amers. Oui, mêmesans bonheur,mêmesans espérance, Quelquepassionfolle, aLimcde souffrance, Quelqueamour désastreux,fléaude tout devoir ; Oui, pourvuqu’il déchaîneen moi tout son pouvoir, Pourvuque bien avant dans ma chair il se plonge, Qu’il aiguisemesjours et sans pitié me ronge ; Qu’importe ?je l’accepteet je m’attacheà lui. llus de fadelangueur,de vagueet mol ennui ; La tempête, en soumantdans une âme élargie, Des hautesfacultésrallume l’énergie ; La foudreéclateen nous, et si l’hommeest vaincu, Avantde succomber,du moinsil a vécu.