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Ainsi chacun aime d’un amour souverain et parfait, s’il aime vraiment. Mais de tous ces amours le plus parfait pourtant et le plus simple, à les bien comparer, sera toujours celui qui est né le plus sans cause.

Pourquoi Christel aima-t-elle le comte Hervé ? Pourquoi du second jour l’admirait elle si passionnément ? Il vient, il entre et salue, et n’est que froidement poli ; pas une parole inutile, pas un regard. Elle ne le connaît que de nom et par une simple information dérobée aux propos voisins. Elle l’admire par ce besoin d’admirer qui est dans l’amour. Qu’a-t-il donc fait pour cela ? Comme si, pour être aimé, il était besoin de mériter ! Il est beau, jeune, ému, fidèle évidemment, et peut-être malheureux : que faut